Les vagues de chaleur hors du commun qui frappent l’Amérique du Nord commencent à inquiéter même les climato-sceptiques...
Aux Etats-Unis, la canicule qui frappe le Midwest continue de faire des ravages. Désormais, la sécheresse couvre 64% du territoire et les températures record du mois de juillet -le plus chaud jamais enregistré depuis 1895- ont gravement endommagé les récoltes.
Voici un reportage au Kansas qui est passé à la radio sur France Info et que l’on peut retrouver sur internet à l’adresse suivante : http://www.franceinfo.fr/monde/le-plus-france-info/usa-secheresse-record-depuis-1956-743449-2012-09-20.
Sur des dizaines de miles, le long des pistes poussièreuses du Kansas, c’est un spectacle de désolation. A perte de vue, des champs brûlés par le soleil, des épis flétris. Soja, maïs, blé, des récoltes entières sont perdues. En ce mois de septembre, le thermomètre affiche encore 40 degrés et cela fait plusieurs semaines que ça dure.
Dans sa ferme de Mac Pherson, au nord du Kansas, Daryl Larson se désole devant ses plantations dévastées. « Cela fait plus d’un mois et demi qu’on n’a pas eu une goutte d’eau et les températures ont dépassé les 40 degrés la plupart du temps. Dans ce champ, c’était du soja. On l’a planté au printemps. Il y a des endroits où il est complétement mort, il est devenu tout marron, les feuilles ont jauni. Sur cette centaine d’hectares, on va peut être faire 10% de récoltes par rapport à une année moyenne. Vous sentez le vent qui souffle en ce moment, il est très chaud, c’est comme une fournaise, il assèche tout très rapidement ».
Partout au Kansas et dans l’état voisin du Nebraska, les rendements sont les plus faibles depuis 10 ans. Le fourrage pour le bétail commence à manquer, les points d’eau sont à sec. On voit partout sur les routes, les fermiers à bord de camion-citerne, à la recherche d’eau pour leurs animaux. Et dans sa ferme de Logan, à la frontière du Kansas et du Nebraska, Dorothy -qui élève une centaine de vaches avec son mari- commence à s’inquiéter pour l’avenir de son exploitation et de ses animaux. « Je ne sais même pas si on a assez de nourriture pour tenir un mois. On n’a aucune idée de la quantité d’eau qu’il reste dans les puits. Si on n’a plus d’eau, il faudra vendre les bêtes avant qu’elles meurent. Je fais attention aux dépenses et c’est un fardeau parce qu’il faut aller à la banque et emprunter toujours plus. C’est un cercle vicieux. On voudrait transmettre la ferme à notre fils Charles, donc ça aussi c’est une inquiétude. Plusieurs fois, il a plu à une dizaine de kilomètres de la maison, mais ici, pas une goutte ».
Plus on monte vers le nord du Kansas, plus c’est sec, plus la situation est dramatique. Sur les sites internet, des fermiers lancent des appels à l’aide, à la recherche de fourrage pour leurs animaux. Certains vont jusqu’au Canada -à 1500 km de là- pour acheter du foin, de la luzerne, vendus en ce moment le double du prix habituel.
L’état d’urgence a été décrété dans 31 états américains. Le Kansas a débloqué des subventions pour aider les agriculteurs à creuser des puits ou à étendre les systèmes d’irrigation et le gouvernement a mis à disposition des champs destinés aux agriculteurs qui n’ont plus rien pour nourrir leurs animaux.
Après avoir vendu une partie de son troupeau, Kendall Grecian, fermier au nord du Kansas, s’est décidé à y conduire ses 300 vaches. « Cela n’est pas une bonne solution parce que l’herbe n’est pas aussi nourrissante que dans nos champs, donc il faut donner des protéines en complément… En plus, nous devons leur apporter de l’eau et aussi construire des enclos provisoires, ce qui coûte très cher et prend beaucoup de temps. On y consacre les ¾ de nos journées mais bon, c’est une des seules solutions ». Les assurances ne couvriront pas toutes les pertes, les fermiers les mieux assurés seront remboursés à hauteur de 60%.
A la bourse de Chicago -qui fixe le cours des céréales pour tout le pays- les cours s’envolent : +26% pour le maïs, +41% pour le blé ces dernières semaines. L’Amérique est le premier producteur mondial de maïs, gros exportateur de soja et de blé.
La hausse des prix pourrait donc avoir de larges répercussions craint Bruce Williams, directeur d’une coopérative agricole de Philippsburg, au Kansas. « En ce moment, le soja se vend très cher, 16 dollars la mesure contre 10 ou 11 dollars normalement et il pourrait même atteindre les 20 dollars. Cela fait 31 ans que je fais ce métier, je n’ai jamais vu de telles fluctuations. Avant, on était toujours étonné quand les céréales variaient de 2 ou 3 cents, c’était déjà une variation importante. Les prix très élevés ne nous aident pas vraiment parce que ça fait monter le prix de l’essence et des denrées alimentaires. En plus, ça nous démoralise encore plus, parce qu’on n’a rien à vendre ».
Chaque jour, les agriculteurs américains gardent les yeux rivés sur le ciel, les quelques gouttes de pluie, tombées il y a 10 jours, n’ont rien changé. Les climatologues estiment qu’il faudra une à deux années pour effacer les traces de cette sécheresse.